Nellie & Armand by Sylvie Payette

Auteur:Sylvie Payette [Payette, Sylvie]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Jeunesse
ISBN: 9782764442616
Éditeur: Québec Amérique
Publié: 2021-02-15T20:12:00+00:00

Chapitre 16

J’ai relu le message quatre fois. Il me paraissait aussi puissant qu’une lettre d’amour. J’étais si fière de compter le pirate parmi nos amis.

Je cherchais à deviner ce que les Maltédoniens voulaient négocier en échange de ma liberté. S’ils souhaitaient tant mettre la main sur la machine du baron de Vimy, c’était qu’ils voulaient un accès à la mer, qui leur apporterait des avantages militaires et commerciaux. Si on pouvait neutraliser leur arme, celle qui détraquait le magnétisme de la Terre, le reste n’aurait pas tant d’importance. Le temps qu’ils développent un port et construisent une flotte de navires, les organisations mondiales pourraient sûrement se préparer à réagir et réussir à contrecarrer leurs plans.

J’essayais de me détendre en me répétant que tout se passerait bien. Je n’étais qu’une marchandise aux yeux de nos ennemis.

Lorsque j’ai voulu en parler à Marily, j’ai découvert qu’elle lisait le journal d’Armand, allongée sur le ventre.

— Hé, qu’est-ce que tu fais ?

— C’est à qui ?

— À Armand.

— C’est trop mignon, il est comme un p’tit chaton qu’on voudrait consoler.

Elle a commencé à lire à voix haute.

— « Mon père semblait insatisfait de mon travail, avec raison. Moi qui ai toujours cherché sa reconnaissance, j’ai manqué cette chance unique. Comment ai-je pu perdre ma concentration à ce point ? L’amour ne devrait jamais constituer la priorité d’un roi. Il aurait fallu que je me montre digne de mon titre, mais j’ai pourchassé Nellie, mon obsession, au lieu de me concentrer sur mes obligations. »

Elle s’est arrêtée et m’a regardée d’un air surpris.

— Oh, il parle de toi ? a-t-elle lancé.

J’ai tenté de lui reprendre le cahier des mains, mais elle a roulé de l’autre côté du matelas pour m’en empêcher.

— « Je dois renoncer à elle. La laisser partir. En plus de la couronne, Henri me prendra-t-il celle que j’aime ? »

Marily s’est retournée vers moi.

— C’est triste. Tu lui as faire perdre la boule, on dirait. Il a plus rien maintenant. Ni amour, ni frère, ni titre.

Je ne voulais pas la laisser continuer. Je lui ai pris le livre des mains.

— Il a beaucoup souffert… C’est très personnel en plus.

— Mais c’est vrai, il a plus rien à cause de toi, a-t-elle insisté.

— Tu crois que c’est de ma faute ?

— Un peu, quand même… et celle d’Henri.

— Et des républicains, ai-je précisé.

— Ah, ben oui… C’est un peu d’ma faute aussi, alors.

J’avais cru Armand contrôlant, mais c’est que sa jalousie l’avait poussé à tout essayer pour empêcher que je lui glisse entre les doigts. On ne retient personne ainsi, mais il voyait tout lui échapper, s’écrouler autour de lui, et il a utilisé les moyens qu’il connaissait.

J’ai lu quelques lignes en silence avant de ranger le livre.

Je m’explique mieux maintenant pourquoi les souverains se satisfont de mariages arrangés. Non seulement représentent-ils des gains politiques, mais, de plus, ils permettent au roi de ne pas perdre pied et d’éviter de prendre de mauvaises décisions par amour… ce qui m’est justement arrivé…

J’ai fermé le carnet. Je me suis dit que je ne continuerais pas. Je connaissais la suite. J’avais le sentiment de mieux comprendre Armand maintenant.

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