Mars 1954 by Galaxie

Auteur:Galaxie [Galaxie]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Science-fiction
Éditeur: Nuit et Jour
Publié: 1954-03-15T00:00:00+00:00

Il avançait menaçant : « De suite tu vas recevoir ce que tu mérites, mon garçon » et il brandissait un fouet. J’attendis qu’il eut presque rejoint Socrate, qui s’était accroupi, grelottant sur les planches humides, attendant les coups. Ce fut plus fort que moi, je me jetai sur Jennings, et nous luttâmes. Il était plus robuste que moi, mais j’étais en possession de tous mes moyens, tandis que lui était saoûl. Je saisis une de ses jambes et la tordis ; il recula alors traîtreusement pour prendre son élan et se rejeter sur moi, mais il chancela, glissa, et tomba, pour disparaître aussitôt, par-dessus le parapet, dans les eaux limoneuses. J’entrevis sa tête émargeant un peu plus bas. Il poussa un hurleraient affreux, puis disparut. Je regardai le chien : « C’est fini… Viens Socrate, te voilà libre, pauvre ami. »

À ce moment la tête de Jennings se montra encore une fois ; il cria, mais beaucoup moins fort. Socrate alors s’agita. Pour la première, et dernière fois, il appela : « Maître ! maître ! » et d’un saut franchit le pont, nageant énergiquement vers l’homme qui se noyait. J’appelai en vain, Socrate ne m’écoutait plus. Un instant je fus tenté d’aller leur porter secours, mais ils étaient impossible à rejoindre. Tess sur mes talons, je courus au barrage, que la rivière franchissait avec un bruit infernal. Je les vis au moment où ils atteignaient la chute d’eau, Socrate avait saisi Jennings par son manteau, et le tenait ferme dans ses crocs. Il s’efforçât de rejoindre la berge, mais le courant était trop violent, d’un coup ils furent projetés par dessus le barrage, dans les remous écumant en dessous. Pendant longtemps, je restai là, espérant, contre tout espoir, les revoir. Ce fut en vain. Ils ne revinrent jamais.

Maintenant je songe avec mélancolie à tout ce que Socrate aurait pu nous apprendre, s’il en avait eu le temps. Simplement même, au sujet de ces extraordinaires apparitions, qu’il connaissait, et que nous ne voyons pas, son apport scientifique aurait été considérable, et il avait à peine un an… En pleine maturité, Socrate aurait pu en remontrer à tous les spécialistes, quelle que fut la partie dans laquelle il eut accepté de travailler. Cher Socrate, mort victime de son dévouement !…

Autre chose aussi me tracasse : Socrate était certainement le résultat d’une véritable mutation, ses frères et sœurs en donnent la preuve, mais cette mutation aurait-elle été définitive ? aurait-elle donné naissance à une nouvelle espèce ?

Puis, la force et la qualité de son intelligence seraient-elles enfin parvenues à l’élever au-dessus des caractères communs à tous les autres chiens ?

Questions troublantes… qui ne seront pas résolues de si tôt.

P.-S. – Je m’aperçois tout à coup que Tess, ma bonne chienne, sous peu aura des petits.

John CHRISTOPHER.

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