Manel by Fazia Kali

Auteur:Fazia Kali
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Books on Demand
Publié: 2023-04-15T00:00:00+00:00

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27 Sorte de crêpe feuilletée

19

Après mon premier entretien avec monsieur Picot, je fus amenée à le rencontrer à deux autres reprises. Comme à son habitude, il excellait pour monopoliser la parole. Heureusement, certains de ses conseils m’avaient aidée. Je ne pouvais le nier, son expérience en tant qu’entrepreneur et investisseur lui donnait une certaine avance sur les autres conseillers que j’avais rencontrés au cours de ma formation.

J’avais fini par venir à bout de mon business plan, pourtant c’était loin d’être gagné au départ. Après plusieurs modifications, j’étais parvenue à sortir un projet cohérent et je me sentais prête à lui présenter.

Madame Sallet m’avait expliqué qu’aujourd’hui serait la dernière intervention de monsieur Picot et donc la dernière occasion de perfectionner mon projet.

En réalité, je n’attendais pas grand-chose de lui, je n’étais pas une future startup en quête d’investisseurs. Je recherchais simplement un avis professionnel et expérimenté sur mon projet d’entreprise.

L’après-midi s’était écoulé calmement. J’avais aperçu Kwan au loin et son associé à l’open-space, en plein brainstorming.

Vers 17 h 30, je m’installai dans la petite salle annexe, là où tous les entretiens avaient lieu. J’ouvris grand la porte.

Je laissai mes jambes vaciller de haut en bas pendant que je relisais mes notes. Je fixais inlassablement ma montre dont les aiguilles semblaient figées dans le temps.

Je redressais mon voile, comptais mes bagues indéfiniment. Puis comme l’attente me sembla interminable, je finis par sortir de la pièce. Comme chaque vendredi soir, après 17 h, le dépôt était presque vide. Une demi-heure était passée. L’espace coworking avait fermé et je commençai à me demander s’il ne valait pas mieux partir.

J’entendis alors une quinte de voix… il apparut enfin, la silhouette trapue et les joues arrondies. Je me levai avec le peu d’énergie qu’il me restait à ce moment-là.

— Mademoiselle Boukri.

— Monsieur. Je vais ai attendu…

— Oui bon, je suis là. Estimez-vous heureuse, dit-il en claquant sa mallette sur la table rectangulaire.

Je souris jaune.

— Pardon ? Heureuse pourquoi ?

— De bénéficier de mes services gratuitement, tiens.

Je me tus. Il reprit alors.

— Si je le fais, c’est uniquement dans le cadre du partenariat qui me lie à madame Sallet.

— Sinon, vous ne l’auriez pas fait, c’est ça ?

Il se mit à ricaner et son crâne dégarni luisait tant il transpirait. Une forte odeur d’alcool parvint jusqu’à mes narines. Je ne rêvais pas, il était saoul.

Je reculai alors ma chaise en évitant de croiser son regard. Comment allais-je pouvoir rester en sa compagnie alors qu’il se trouvait dans un état pareil ?

Je pris sur moi et lui tendis ma feuille. Je me demandai s’il parviendrait à déchiffrer quoi que ce soit. Il agrippa une bouteille d’eau et l’aspira de toutes ses forces.

Je sentais mon inconfort grandir mais je décidai de rester professionnelle, il fallait que je tienne le coup. Il lisait et clignait des yeux en même temps et j’attendais désespérément qu’il mette fin à cet entretien. Il plaqua ma feuille sur la table qui était placée entre nous et se mit à me toiser.

Je déglutis.

—Alors

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