L'espionne de Tanger by Duenas Maria

L'espionne de Tanger by Duenas Maria

Auteur:Duenas, Maria [Duenas, Maria]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature Espagnole, Best sellers
Éditeur: Ninick - TAZ
Publié: 2013-04-17T22:00:00+00:00


31

Le lendemain matin, le monde adopta un rythme différent. Pour la première fois depuis plusieurs semaines, je ne me levai pas de bonne heure, je ne bus pas un café rapide, je ne m’installai pas tout de suite dans mon atelier, entourée de tâches urgentes. Loin de reprendre l’activité frénétique des journées précédentes, je commençai par le long bain interrompu la veille. Puis, en me promenant, j’allai chez Rosalinda.

J’avais déduit des paroles de Beigbeder que son malaise était léger et passager, à peine une indisposition inopportune. Je m’attendais donc à trouver mon amie dans son état habituel, disposée à écouter tous les détails de la réception qu’elle avait loupée et anxieuse de savoir quelles tenues portaient les invitées, qui était la plus élégante, qui la moins.

Une domestique me conduisit à sa chambre. Rosalinda était encore couchée, entourée d’oreillers ; les persiennes étaient fermées et il régnait dans la pièce une forte odeur de tabac, de médicaments et de renfermé. La maison était vaste et belle : architecture mauresque, meubles anglais et un capharnaüm exotique où se mêlaient, sur les tapis et le capitonné des canapés, des disques en dehors de leurs étuis, des enveloppes estampillées air mail, des foulards de soie oubliés et des tasses en porcelaine de Staffordshire remplies de thé refroidi.

Ce matin, pourtant, Rosalinda dégageait tout sauf du glamour.

— Comment vas-tu ?

Je m’efforçai de ne pas avoir l’air trop inquiète. J’avais cependant de bonnes raisons pour l’être, compte tenu de son aspect : pâle, les yeux cernés, les cheveux sales, elle était effondrée tel un poids mort sur le lit défait dont les draps traînaient par terre.

— Affreux, répondit-elle, d’une humeur de chien. Je vais très mal, mais assieds-toi ici, près de moi, ordonna-t-elle en donnant une tape sur le lit. Ce n’est pas contagieux.

— Juan Luis m’a parlé hier d’un problème intestinal, dis-je en lui obéissant.

Je dus auparavant enlever plusieurs mouchoirs froissés, un cendrier rempli de cigarettes à moitié fumées, les restes d’un paquet de petits-beurre et bon nombre de miettes.

— That’s right, mais ce n’est pas le plus grave. Juan Luis ne sait pas tout. Je le lui dirai cet après-midi, je n’ai pas voulu l’embêter le dernier jour de la venue de Serrano.

— Qu’est-ce qui est le plus grave, alors ?

— Ça.

Serrant entre ses doigts semblables à des griffes ce qui paraissait être un télégramme, elle était furieuse.

— Voilà ce qui m’a rendue malade, pas les préparatifs de la visite. C’est pire que tout.

Je la regardai, perplexe. Elle m’en résuma le contenu :

— Je l’ai reçu hier. Peter arrive dans six semaines.

— Qui est Peter ?

Je ne me rappelais personne qui ait ce prénom parmi ses amis. Rosalinda me dévisagea comme si je venais de lui poser la plus absurde des questions.

— Qui veux-tu que ce soit, Sira ? Mon mari !

Disposé à passer une longue période avec sa femme et son fils, après quelque cinq années où il n’avait presque plus eu de leurs nouvelles, Peter Fox avait prévu de débarquer à Tanger d’un navire de la P&O.



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