Les murmures du château by Unknown

Auteur:Unknown
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Guy Saint-Jean Editeur
Publié: 2022-12-28T00:00:00+00:00

20

Émilie fut occupée toute la matinée du lendemain. Elle avait rendez-vous avec l’architecte et le chef de chantier. Après avoir parcouru toute la maison avec eux et discuté en détail des rénovations, elle n’en crut tout d’abord pas ses yeux quand elle vit l’estimation des coûts revue et corrigée, mais l’architecte lui assura que chaque centime valait la peine d’être investi, car, une fois restauré, le château gagnerait encore en valeur.

— Je suis sûr que nous aurons souvent l’occasion de nous parler durant les prochains mois, précisa Adrien, le maître d’œuvre. Ne soyez pas surprise la prochaine fois que vous reviendrez quand vous verrez l’état du château. Vous serez sans doute renversée de le voir ainsi, mais il vous faudra être patiente, car il ne pourra pas retrouver son aspect d’origine en un clin d’œil.

Une fois qu’ils furent partis, Émilie ferma la porte d’entrée et se mit à errer doucement d’une pièce à l’autre. Même si elle avait le sentiment d’être parfaitement ridicule et trop sentimentale, elle indiqua à toutes les pièces que les transformations qu’elles allaient subir étaient pour leur bien.

Elle avait appelé Jean plus tôt dans la journée, et il l’avait invitée à souper et à dormir dans leur maison. Elle retourna dans l’arrière-cuisine, où elle avait laissé sa valise et les deux sacs-poubelle noirs dont elle sortit la dernière pile de lettres et de photos qu’elle n’avait pas encore regardées. Elle prit une enveloppe jaunie et l’ouvrit. À l’intérieur, une photo d’Édouard quand il était jeune. Il devait avoir dans les vingt ans et posait sur une plage en compagnie d’une magnifique jeune fille aux cheveux blonds, un bras protecteur passé autour de ses épaules. Émilie la reconnut, car elle avait déjà vu son portrait dans le bureau de son père. C’était sa sœur, Sophia. Il y avait aussi une petite feuille de papier dans l’enveloppe qui semblait avoir été arrachée à un carnet… Émilie la déplia et vit l’écriture familière, irrégulière et enfantine.

« Mon frère… »

— Mon frère, murmura Émilie, puis elle fit de son mieux pour déchiffrer l’écriture quasiment illisible.

C’était un éloge d’Édouard et il était signé, comme les autres poèmes qu’elle avait lus, « Sophia de La Martinières ». Son âge était également indiqué : quatorze ans.

Les doigts engourdis par le froid intense qui régnait dans la maison vide, Émilie retourna s’asseoir dans le fauteuil à côté du fourneau. Le poème illustrait parfaitement les sentiments de la jeune Sophia envers son frère : elle l’adorait. Alors, pourquoi Édouard ne parlait-il jamais d’elle ? La photo montrait clairement l’affection entre le frère et la sœur. Il devait donc y avoir une raison bien particulière à ce silence.

Émilie rangea le poème et la photo dans son sac, prit les sacs-poubelle et la valise, et ferma la porte du château pour la dernière fois. Elle était au volant de sa voiture, en route pour la maison de Jean, quand son téléphone portable sonna. Voyant le nom de Sebastian apparaître sur l’écran, elle arrêta brusquement le véhicule et décrocha.

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