Les enfants d'Aliel, tome 5 - Ciel de cendres by Sara Schneider

Les enfants d'Aliel, tome 5 - Ciel de cendres by Sara Schneider

Auteur:Sara Schneider [Schneider, Sara]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantasy
Éditeur: Bookelis
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


Lilas longeait par la berge le camp des exilés, en vue de localiser la maison de Triston, l’entrepreneur qu’elle avait rencontré lors de son précédent séjour à Vicombe. Il aurait peut-être eu vent de la présence en ville d’une femme masquée aux cheveux rouges. Tout au fond d’elle, Lilas nourrissait également l’espoir de retrouver la trace de Capucine et de Pacandre. Elle se dirigeait de mémoire, sachant Kyr-Son sur ses talons par le son mouillé que produisaient ses pas. Elle-même avait revêtu ses bottes, ne supportant plus le contact sur sa peau de cette cendre collante et irritante. L’image du Mont Tendre, de Clarbiel et de ses habitants réduits en poussière, projetés dans le ciel et recrachés sur le pays entier, la hantait. Cette boue lui faisait horreur et elle était partout ; impossible d’y échapper. Si au moins le ciel se dégageait pour permettre à cette bouillasse de sécher, mais non, une chape grise s’était installée sur la région, tenace et indélogeable. À tout moment survenaient la pluie, puis la neige et parfois l’orage et la tempête. Lilas ne savait plus décoder les indices soufflés par les vents, la densité de l’air ou les animaux qui auguraient autrefois des perturbations. Le temps la prenait par surprise, la dépouillait de ses repères, puis la laissait déconcertée, perdue, trahie.

Ce matin-là, elle avait vu ses coéquipiers retrouver de l’allant et se relancer avec entrain dans la traque d’Orga, alors elle avait donné le change et endossé la même humeur, mais ses pensées réelles faisaient écho à cette fange sous ses pieds : sombres, poisseuses, inextricables. On la héla depuis les baraques, sans qu’elle parvienne à comprendre si on l’insultait ou si on la saluait. Ses doigts se serrèrent autour de son bâton ; elle n’aurait pas refusé une petite altercation. Deux hommes s’avancèrent dans sa direction, sans se presser.

— N’interviens que si je te le demande, souffla-t-elle à Kyr-Son.

— Entendu.

La confiance qu’il lui témoignait la galvanisa, et son corps se prépara au combat dans une agréable combinaison d’assurance et de tension. C’était comme si le limon ne collait plus à ses semelles, comme si un rayon avait transpercé la grisaille.

— Hé, ma jolie ! l’apostropha l’un des hommes. Passe une belle journée !

Elle resta déconcertée, étonnée par sa déception d’être privée de bagarre.

— Fausse alerte, chuchota Kyr-Son. Heureusement.

— Oui, heureusement, s’entendit-elle mentir.

Elle poursuivit, songeuse, son trajet sur la berge. Les rives se firent de plus en plus fréquentées à mesure qu’avançait la matinée. Les réfugiés allaient et venaient entre les habitations et le rivage, charriant de la saleté et la jetant dans le fleuve, ou prélevant l’eau du fleuve pour la rapporter chez eux. On poussait dans l’Inga cette maudite cendre et on collectait cette même eau pour la consommer. Ce non-sens occupa l’esprit de Lilas jusqu’à ce qu’elle repère la maison de Triston qui s’élevait au-dessus des taudis, comme une citadelle surplombant sa ville-basse. Bien que l’étage inférieur soit aussi crasseux que les bicoques alentour, les niveaux supérieurs arboraient le gris clair qui, en Nivlande, était devenu le nouveau blanc.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.