Les démons sont éternels by Simon R. Green

Les démons sont éternels by Simon R. Green

Auteur:Simon R. Green [Green, Simon R.]
La langue: fra
Format: epub
Tags: SF
ISBN: 9782841724673
Publié: 2008-01-05T08:51:00+00:00


En quittant l’ancienne bibliothèque, j’avais le crâne farci de préoccupations nouvelles. J’avais appris des choses fondamentales, presque toutes terrifiantes, qui me confortaient dans l’idée de mettre à exécution mon plan secret. Si je devais entrer en guerre contre les Dieux Affamés pour sauver la réalité tout entière, je voulais des alliés de poids. D’abord, il me fallait un endroit tranquille pour utiliser le miroir de Merlin d’une manière qui déplairait souverainement à la famille. Je sortis donc du manoir pour me réfugier dans la chapelle abandonnée blottie dans un coin du parc. L’ancienne tanière de Jacob, jusqu’à ce que je le fasse revenir au manoir. Elle était interdite au public depuis que Jacob s’y était installé des siècles auparavant, et même s’il avait déménagé le règlement était toujours valable.

Je m’approchai de la vieille bâtisse avec force précautions, mais le lierre qui recouvrait à moitié la lourde porte en bois ne frémit même pas. Quand Jacob vivait là, le lierre lui servait de chien de garde et empêchait qu’on le dérange. Mais après son départ, c’était redevenu une plante ordinaire. Le bois avait joué, et la porte ne fermait plus bien depuis des lustres. Je pesai de tout mon poids pour l’ouvrir davantage ; elle grinça contre le sol dallé en soulevant des nuages de poussière âcre. Entre deux quintes de toux, j’appelai Jacob. J’espérais encore, mais nul ne répondit.

Jacob avait disparu.

Les bancs, couverts de toiles d’araignée, étaient entassés contre un mur. Le grand fauteuil de cuir n’avait pas bougé, pas plus que le vieux téléviseur posé en face. L’appareil n’était qu’une carcasse creuse. Il n’était pas difficile de revoir Jacob vautré devant un souvenir d’émission de télé. Le réfrigérateur déglingué était toujours là, mais vide. Je le refermai et m’assis dans le fauteuil. Le cuir émit des craquements sinistres.

J’aurais voulu que Jacob fût toujours là. À lui, je pouvais parler. Et peut-être aurais-je pu lui faire assez confiance pour me laisser dissuader de mettre mon plan à exécution. Je n’étais pas capable de mener une guerre. Je n’avais pas l’expérience nécessaire, l’épisode de la plaine l’avait amplement prouvé. Hors de question de laisser d’autres Drood mourir par ma faute. Il me fallait l’appui de spécialistes, de vrais tacticiens, pour établir les plans de bataille. Ne voyant pas où les trouver à mon époque, j’allais donc chercher dans le passé et dans l’avenir.

L’armurier me l’avait interdit. Mais j’ai toujours eu du mal à obéir sagement.

Je sortis le miroir de Merlin et l’examinai un moment en le tournant en tous sens. J’avais conscience des risques que j’allais courir. Pas le choix : il fallait protéger la famille. Je secouai le miroir pour l’agrandir jusqu’à ce que, suspendu dans les airs, il ne reflète plus rien.

« Ouvre-toi sur le passé, lui enjoignis-je. Et trouve-moi le meilleur guerrier, le meilleur tacticien, pour m’épauler lors de la guerre qui se prépare. Trouve-moi un homme de bien, un homme digne de confiance. Trouve-moi l’homme de la situation. »

Le miroir me montra soudain l’image parfaitement nette de… Jacob Drood.



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