Les colères du chat-tigre by Jeff Clinton

Auteur:Jeff Clinton [Clinton, Jeff]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature américaine, Western
Éditeur: Gallimard - Série Noire
Publié: 1962-09-14T23:00:00+00:00

CHAPITRE IX

À en juger d’après le soleil qui baignait la rue, il devait être midi passé. La moitié du temps dont disposait O’Shea était maintenant écoulée.

Dans le demi-jour du saloon tranquille à cette heure, Wildcat commençait à avoir bu un peu plus qu’il n’était raisonnable.

— Si ce sacré Eddie Enterprise ne montre pas bientôt le bout de son nez, marmonna-t-il en contemplant sa bière tiède, je vais le chercher.

Dolores glissa une main sous la table pour lui caresser la cuisse.

— Monte avec moi, Wildcat. Tu prends vraiment les choses trop à cœur.

— Des clous ! Faut que j’attende le môme Enterprise.

Une expression perplexe sur son petit visage effronté, la fille lui remplit de nouveau son verre.

— C’est une ville de cinglés, remarqua-t-elle. Oublions tout ça, Wildcat, et viens là-haut avec moi.

— Selon toi, ça résout tous les problèmes, hein ? dit O’Shea avec un sourire amusé.

Elle lui coula un regard canaille.

— Fais-moi confiance ! Je pourrais te faire des trucs dont ta pouffiasse blonde ne connaît même pas l’existence !

O’Shea avala une gorgée de bière en fronçant les sourcils.

— Putain, elle en met du temps à faire ses courses !

Des étincelles dans le regard, Dolores fit bouffer ses bouclettes d’un noir de jais.

— Ne pense donc pas tout le temps à cette garce, Wildcat. Je suis à ta disposition, moi.

— Je ne suis pas tranquille de la savoir en ville avec la clé de la prison dans son corsage.

— Foutaise ! laissa tomber Dolores en se renversant sur son siège.

— Tu sais bien que je te préfère, poupée, dit O’Shea en caressant l’épaule nue de la fille.

— Qu’est-ce que t’en sais ? répliqua-t-elle avec une moue boudeuse. Tu m’as même pas encore sautée.

— C’est pas l’envie qui m’en manque !

Le visage de Dolores s’éclaira.

— Vrai ? alors on monte ?

— Dans un moment.

Elle leva les yeux au plafond avec un gros soupir.

Du fond de l’immense salle, O’Shea surveillait, au-delà de l’océan de tables inoccupées et de la brochette de soiffards accoudés au comptoir, le brillant rectangle jaune de la porte d’entrée.

Wildcat était d’une humeur noire. Midi largement passé, et il n’avait toujours pas le moindre indice pouvant l’aider à mettre la main sur le pilleur de banque. Son unique espoir – le nommé Eddie Enterprise qu’il avait invité ici pour tromper le voleur sur l’origine des tuyaux éventuellement fournis par Randy Tyler – ne se montrait pas. De toute évidence, le petit gars ne viendrait jamais.

Jusqu’ici, une seule personne avait parlé – un cow-boy de l’équipe d’un ranch appelé le Rocking Y. Un gars de sa connaissance, avait-il dit, était assez salaud pour voler les économies des pauvres gens et tuer un vieux bonhomme de caissier. Malheureusement, après avoir réfléchi un peu, cet informateur avait ajouté que son suspect se trouvait à cinquante kilomètres de là au moment du vol et ne pouvait donc pas être responsable du braquage.

Par conséquent, estima O’Shea en versant une giclée de bourbon dans sa bière pour l’adoucir, il n’avait pas fait le moindre pas en avant. Sauf dans la direction des ennuis.

Malgré tout, il ne désespérait pas encore complètement. Le tueur se trouvait toujours à Farmington, c’était l’évidence même.

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