Le papillon de verre by Katrine Engberg

Le papillon de verre by Katrine Engberg

Auteur:Katrine Engberg [Engberg, Katrine]
La langue: fra
Format: epub
Tags: policier, Thriller
Éditeur: 12-21
Publié: 2022-02-03T08:06:06+00:00


*

La musique de l’orgue pesait contre ses tympans. Marie Birch leva le visage vers le plafond voûté de l’église de Holmen et essaya de suivre la course de l’organiste de haut en bas de la gamme. Le banc dur en bois craqua quand elle s’allongea. Les églises étaient de bons endroits où se réfugier lorsqu’il pleuvait. Pour la plupart, elles étaient calmes et vides, mais parfois le chœur répétait, et alors, c’était presque comme s’ils jouaient un concert privé pour elle.

La musique se déversait en elle, titillant agréablement ses terminaisons nerveuses. Parfois, elle pouvait se mettre très en colère, même si elle savait que cela ne servait à rien, que cela n’affectait qu’elle. Avec le temps, elle avait appris à se raisonner. Mais elle n’y parvenait pas toujours.

Toutes ces fois où elle s’était tenue devant la porte d’un bureau fermé, à attendre humblement un médecin trop occupé par la paperasse pour la voir. Ces dos tournés, ces regards rapides, ces employés stressés dans des services en sous-effectifs qui, épuisés, n’avaient rien d’autre à offrir que de la sympathie. Et des médicaments.

Nous sommes désolés.

Tu sais ce que c’est.

Nous augmentons ta dose.

Elle serra les poings et les pressa contre ses yeux.

Kim était différent, il avait pris le temps de longues discussions et l’avait aidée à se comprendre. C’était en grande partie grâce à lui qu’après les Papillons, elle s’était libérée de la psychiatrie, et qu’elle pouvait aujourd’hui voler de ses propres ailes. Quand elle pensait aux visites médicales hebdomadaires des docteurs dans les services ouverts, où ils essayaient d’élaborer en quinze minutes de prétendus projets pertinents pour le futur, elle se mettait toujours en colère. Les hôpitaux psychiatriques n’avaient tout simplement pas les moyens de traiter ; c’étaient des parkings que les malades devaient se partager avec beaucoup d’autres malades, et où personne ne recevait l’aide dont il avait besoin. Beaucoup de compétence et de bonne volonté, mais pas de temps et pas de bras.

Marie ignorait le nombre de fois où elle avait attendu au sein d’un groupe de patients pour s’entendre dire qu’il ne restait qu’un seul lit dans tout le Grand Copenhague et qu’ils devraient eux-mêmes décider lequel d’entre eux en avait le plus besoin.

Elle n’avait pas choisi de vivre dans la rue, elle avait été poussée dehors. La société n’avait pas de place pour sa maladie, surtout maintenant qu’elle était adulte. En revanche, elle remarquait une méfiance, voire une agressivité de la part du monde extérieur, qui par ailleurs se targuait de soigner les malades. C’était un mensonge destiné à sauvegarder l’image que les bien-portants avaient d’eux-mêmes : des gens décents et prêts à l’inclusion. Mais les soins ne s’étendaient pas aux malades mentaux. Il n’y avait jamais de réelle sympathie pour les déviants, les fous qui se cognaient la tête contre les murs. Ils étaient dangereux.

Quand suis-je devenue dangereuse ? se demanda-t-elle. Marie, calme, introvertie, blessée. Quelque part en chemin, l’enfant anxieuse qu’elle était avait abandonné l’anxiété et embrassé la colère. Elle n’avait plus peur de l’obscurité, d’être seule parmi les ombres.



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