Le livre bleu de Nebo by Manon Steffan Ros

Le livre bleu de Nebo by Manon Steffan Ros

Auteur:Manon Steffan Ros [Ros, Manon Steffan]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Actes Sud
Publié: 2022-04-07T14:01:32+00:00


DYLAN

Ça fait un moment que je n’ai pas parlé de Pwyll.

Voilà ce qui s’est passé.

Le lièvre a commencé à me faire confiance, mais c’est venu petit à petit, tout doucement. Moi aussi j’ai commencé à lui faire confiance. Au fond de moi, j’avais encore un peu peur de lui, de cette drôle de tête morte qui me fixait tout le temps à l’arrière de son crâne. Mais j’ai lu assez de livres pour savoir que les gens ne sont pas les mêmes à l’intérieur et à l’extérieur.

(Dans le volume 2 des Contes populaires du pays de Galles d’Endaf Hughes, il y a l’histoire de Melangell, la sainte qui sauve un lièvre poursuivi par un chasseur. L’histoire dit que Melangell s’est elle-même changée en lièvre et que son âme est restée enfermée dans le corps gris et bondissant de l’animal. Qui sait, c’est peut-être elle, dans ce lièvre à deux têtes ?) J’ai décidé de ne pas faire attention à ce qui n’allait pas chez lui.

À chaque fois que je venais m’asseoir dans l’abri de jardin, j’apportais un morceau de carotte ou une feuille de chou que je tenais dans ma main en essayant de bouger le moins possible. La première fois, Pwyll ne s’est pas approché d’un pouce, mais la seconde, il s’est faufilé hors de sa cachette derrière les pots de peinture et il est resté assis là, à me regarder. Et puis, doucement, il a fait un pas vers moi, et finalement il a bondi pour prendre la nourriture dans ma main.

Maman n’aurait pas compris, d’autant qu’on a tout juste de quoi manger, sans assez de restes pour nourrir un animal de compagnie.

Je me souviens quand j’ai touché Pwyll pour la première fois.

Il était lisse et doux, et même s’il avait encore peur de moi, il savait que je ne lui ferais pas de mal. Je n’ai pas touché sa deuxième tête, parce que ça aurait été un peu comme toucher une cicatrice. Au bout de quelques semaines, Pwyll montait sur mes genoux pour manger, et après il s’endormait là, bercé par mes caresses sur son dos.

C’est agréable d’avoir quelque chose de petit et de doux à aimer.

Il y a toujours des choses à faire. Des arbres à couper, du débroussaillage, des choses à réparer ou à ranger. Mais chaque jour je prenais une heure pour être avec Pwyll. Parfois, quand il s’allongeait d’une certaine façon sur ma poitrine, je sentais son pouls, fragile sous ses côtes.

Un matin froid d’octobre, j’ai emmené Mona le voir. Elle portait son manteau bleu et son bonnet en polaire, et ses cheveux frisaient dans sa nuque.

Elle a regardé Pwyll, et elle a vite agrippé ma jambe. Elle voyait un monstre, pas un petit animal, et tout à coup l’abri semblait trop petit pour nous trois.

– Ne t’inquiète pas, j’ai dit en me mettant à genoux. Il s’appelle Pwyll et il est gentil. Regarde !

J’ai sorti une rondelle de carotte de ma poche. Pwyll s’est avancé à petits pas, il a pris le bout de carotte dans ma main et a commencé à manger.



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