Le grizzly by Curwood

Le grizzly by Curwood

Auteur:Curwood
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Hachette Jeunesse


13

Tyr et Iskwao

Pendant plus de deux heures, Tyr continua d’entraîner Muskwa vers le nord.

Ils avaient parcouru une bonne cinquantaine de kilomètres depuis qu’ils avaient quitté le sentier des chèvres, et ces cinquante kilomètres avaient été pour l’ourson comme un voyage autour du monde.

Normalement, il n’eût jamais couvert pareille distance avant la fin de sa deuxième année et peut-être même de sa troisième.

Pas une seule fois, au cours de cette randonnée, Tyr n’avait perdu son temps à longer les contreforts aux flancs de la montagne. Il avait suivi rigoureusement le cours rapide des ruisseaux.

Une heure après avoir rencontré le vieil ours, Tyr changea brusquement de tactique et obliqua résolument vers l’ouest.

Quelques instants plus tard, le grizzly et l’ourson gravissaient une fois de plus les premières pentes d’une montagne.

Heureusement pour Muskwa, de nouveau épuisé, ils ne tardèrent pas à s’engager dans un col au sol presque uni, qui les conduisit sans effort sur les pentes d’une autre vallée.

C'était la vallée dans laquelle Tyr avait tué l’ours noir dont la carcasse pourrissait à trente kilomètres plus au sud.

Dès l’instant où Tyr eut contemplé les frontières septentrionales48 de son domaine, un changement se produisit en lui, changement dont Muskwa eût rendu grâce au Ciel, s’il avait su parler...

Tyr cessa tout à coup de se hâter.

Pendant un quart d’heure, il étudia les creux de la vallée et flaira l’air.

Puis, il descendit lentement et, quand il atteignit les prairies vertes et les rives du ruisseau, il se tourna face au vent, qui venait en plein du sud-ouest.

Ce fut seulement au moment où le soleil se couchait que l’inattendu se produisit.

La brise très légère ayant viré brusquement à l’est, Tyr perçut une odeur qui l’immobilisa pendant une demi-minute.

L'instant d’après, il s’élançait à l’assaut d’un contrefort. Muskwa se jeta à sa poursuite. Mais il perdait sans cesse du terrain. Et il aurait été certainement distancé, complètement perdu, si Tyr ne s’était arrêté pour s’orienter de nouveau.

Lorsqu’il se mit à gravir le deuxième contrefort, Muskwa l’aperçut et, avec un cri de supplication, il se précipita sur ses traces.

À une centaine de mètres, une courbe se creusait au flanc de la montagne et, dans cette courbe, flairant l’air comme le faisait Tyr lui-même, se trouvait un autre grizzly, l’une de ces femelles que les Indiens appellent Iskwao. Un ourson d’un an gambadait près d’elle.

Tyr s’avança. Muskwa s’attendait, une fois encore, à une bataille. Mais il y avait une chose qu’il ignorait. C'est que Tyr et Iskwao étaient du même sang, ayant eu la même mère.

Ils mirent cinq minutes à se rejoindre. Puis, selon l’étiquette, ils se flairèrent le nez cérémonieusement.

Sur ces entrefaites, l’ourson d’un an eut la malencontreuse idée de vouloir se joindre au cercle de famille.

Les Indiens l’auraient appelé Pipoonaskoos, un nom long qui signifie « quatre saisons ».

Pipoonaskoos s’approcha donc hardiment de Tyr.

Pendant un instant, Tyr ne parut pas s’apercevoir de sa présence. Puis, de sa patte droite, il saisit l’ourson et l’envoya voltiger à quelques mètres.

Muskwa, lui, avait envie de se battre. Avec une clameur de défi, il s’élança le long de la pente et se rua sur Pipoonaskoos.



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