Le domaine des innocents (French Edition) by Thilliez Thomas

Auteur:Thilliez, Thomas
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Le Héron d'Argent
Publié: 2024-08-16T00:00:00+00:00

Chapitre 10 : Lamentations et néant

J’eus l’impression que mon corps explosait quand il percuta le faux plafond avant d’éventrer la surface de l’eau. Un véritable bombardement sembla ravager tous mes organes qui brûlaient maintenant d’une douleur incandescente. Doucement, je coulai au fond de ce bassin obscur pour me coucher sur son lit. La fraîcheur qui régnait ici, couplée à mon asphyxie, commença à endormir peu à peu la douleur. Je me sentais bien et étais prête à mourir noyée si je pouvais cesser de souffrir. De toute manière, chacun de mes os devait être brisé après une telle chute. Alors, je restai ainsi à fixer la surface de l’eau au-dessus de moi, qui formait encore des ondes suite à l’impact. Retenir ma respiration devenait compliqué et je me préparai, dans un geste quasi involontaire, à inspirer une grande quantité d’eau. J’espérai que tout irait vite.

Cependant, quand l’air vint réellement à manquer, mon corps estima que mon heure n’était pas encore arrivée. Alors, plutôt que de m’abandonner à la douceur de la mort, je fus contrainte, dans une chorégraphie mal coordonnée, de remonter. L’air me brûla les poumons alors que je perçais la surface de l’eau pour reprendre mon souffle. En rejoignant avec difficulté le rebord du bassin, la douleur se réveilla et fut tellement intense que j’avais toute la peine du monde à en identifier l’origine. J’en déduisis tristement que je m’étais changée en une gigantesque plaie mouvante. Couchée par terre, je m’étonnai cependant de la présence d’un tel bassin au milieu du Domaine des Innocents. En effet, celui-ci devait faire dans les dix mètres de rayon et était suffisamment profond pour m’avoir sauvée. Visiblement, quelque chose ici voulait que je reste en vie. L’eau débordait pour s’écouler dans le couloir face à moi.

« Encore un », pensai-je en me relevant.

Comme il était inconcevable de remonter par où j’étais arrivée, je me résignai à explorer. Malgré les cinquante centimètres d’eau qui s’y écoulaient lentement, ce couloir n’avait rien de bien différent avec la centaine d’autres que j’avais traversés avec Donovan. Mon Dieu, le brigadier-chef devait être mort d’inquiétude ! Voilà près d’un mois que nous étions piégés ici et que nous passions tout notre temps ensemble. Il était devenu mon meilleur ami et me retrouver séparée de lui me donnait l’impression d’avoir été amputée d’un membre.

— À l’aide !

Je sursautai en entendant cette voix terriblement familière.

— Marion, c’est toi ? hurlai-je en pressant le pas.

— Venez m’aider !

Je ne reconnus pas ma nièce dans ce second cri, mais ne ralentis pas l’allure pour autant.

— Pitié !

— À moi !

— Je vous en supplie, ne me laissez pas là.

Bientôt, des dizaines de voix se joignirent à celle de Marion. Le couloir devait remonter légèrement car, au fur et à mesure que j’avançais, le niveau de l’eau diminuait jusqu’à disparaître. Une sueur froide dégoulina de mon front tandis que je réalisais qu’ils devaient maintenant être des centaines à hurler. Les cris commençaient même à faire trembler les parois des murs. Je regrettais

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