Le dernier ennemi by Richard Hillary

Auteur:Richard Hillary [Hillary, Richard]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Guerre 1939/1945
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Je pensais que ces paroles convenaient parfaitement à mon avion.

La légende des enfants de Tarfside courait déjà dans l’escadrille et aucune patrouille ne serait rentrée d’un exercice sans, tout d’abord, voler en rases mottes, en formation serrée, le long de la vallée, où les enfants, groupés dans l’herbe, au bord de la route, nous faisaient des signes de la main, criaient et dansaient en extase.

Quand bien même nos permissions ne coïncidaient pas, je voyais assez souvent Peter Pease. Il était toujours évasif, et cela m’exaspérait. J’éprouvais le besoin de voir ce qu’il cachait sous cette réserve polie. Il me fallait provoquer des discussions, afin de découvrir le fond de sa pensée. Plus il était réservé, plus je me montrais agressif et sarcastique. Cela ne servait à rien. Je lui lançais la balle, mais il la mettait tranquillement dans sa poche. Chaque fois que je croyais l’avoir mis au pied du mur, il s’excusait avec un sourire et se retirait chez lui pour écrire des lettres. Ce que je ne savais pas, mais que j’aurais pu deviner, c’est qu’il était amoureux.

Une fois, pourtant, nous partîmes pour Aberdeen voir Colin et dînâmes ensemble en ville. Colin et moi, nous conspirâmes pour l’entraîner dans un dancing. Nous montrâmes tous deux une grande envie d’y aller et plutôt que de témoigner de l’embarras, il accepta de nous accompagner.

L’odeur d’humanité était pesante. Nous étions assis au balcon, tandis que les couples serrés circulaient lentement sur la piste. Une jeune femme, violemment parfumée, à la chevelure blonde sensationnelle, était près de moi.

« Vous avez l’air triste, me dit-elle. Venez donc danser ! »

Je montrai mon pied, en m’excusant, et soupirai :

« Foulé la cheville, je regrette. Mais voici mon ami qui est un excellent danseur. »

Je me tournai vers Peter Pease et lui dit : « Puis-je vous présenter à Miss… ? Excusez-moi, je n’ai pas saisi ! votre nom.

— McBride. Mes amis m’appellent Dolly.

— Miss McBride, Mr. Pease. »

Peter se leva.

« J’ai bien peur de danser assez mal le tango, mais je veux bien essayer. »

Ils descendirent l’escalier, pour apparaître un instant après sur la piste. Colin et moi allongions le cou. Dolly fixait Peter avec passion, et ils causaient en riant. À la fin de la danse, Peter l’accompagna jusqu’au bord de la piste, la remercia et regagna l’escalier.

« Raté ! fit Colon, tristement. C’est nous qui sommes ridicules ! »

La confiance que Peter avait en lui-même m’était pénible. Bien qu’il fût timide, il demeurait parfaitement sûr de lui. Je me louais plutôt moi-même de ma propre suffisance et d’être capable de me sentir à l’aise avec des gens de toute condition et de tout âge ; mais, avec Peter c’était comme si, à tout instant, il allait découvrir que je portais une cravate toute faite. Il aurait, bien sûr assez de tact pour ne pas le faire remarquer ; il ferait même tout son possible pour être plus aimable qu’auparavant. Mais le fait était là : mon camarade le savait. Pas moyen d’échapper

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