Le Château des secrets - T3 - Les Cœurs apaisés - Partie 1 by Marie-Bernadette Dupuy

Auteur:Marie-Bernadette Dupuy [Dupuy, Marie-Bernadette]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature
Éditeur: Calmann-Lévy
Publié: 2023-09-11T10:17:34+00:00

7

Le poids de l’inacceptable

Château Mongenot, vendredi 19 octobre 2018

Un profond silence régnait dans le manoir où Catherine s’affairait depuis le début de la matinée. Malgré ses efforts pour égayer et moderniser les différentes pièces du rez-de-chaussée, elle n’était jamais vraiment à l’aise dans le fief des Mongenot.

Elle avait eu l’accord de Jean-Charles pour changer un peu la décoration de son bureau, à la condition de ne pas faire peindre les lambris en chêne qui recouvraient les murs. Seule dans ce véritable sanctuaire dédié aux vignobles de la famille, elle éprouvait un réel découragement.

— Il n’y a rien à faire, se désola-t-elle, prête à renoncer.

Ses yeux d’un vert très clair se posèrent tour à tour sur les cadres qui protégeaient des certificats d’excellence acquis par les Mongenot au fil des années, puis sur un meuble colossal à vitrine, rempli d’ouvrages reliés en cuir. Enfin ils fixèrent un long moment une statue en bronze représentant une jeune vendangeuse, courbée sous le poids de sa hotte débordant de raisins.

— Quelle œuvre remarquable, admit Catherine.

On frappa à la double porte au même instant. Elle espéra qu’il s’agissait d’Audrey, une jeune femme de chambre engagée deux semaines auparavant et qui lui était sympathique. Mais lorsqu’elle ouvrit, ce fut pour se trouver en face de Nadine.

— Madame, je viens prendre vos ordres pour les repas de ce jour, annonça la gouvernante d’un ton obséquieux.

— Faites à votre idée, selon votre habitude, rétorqua-t-elle. Je vous avais demandé de ne pas me déranger, Nadine, et bien sûr, vous me désobéissez une heure plus tard ! Monsieur est vraiment trop bon de vous garder à son service.

Un vague sourire sur ses lèvres minces, la gouvernante jeta des regards curieux dans le bureau.

— Je pensais que vous voudriez choisir les menus, Madame.

— Non, vous êtes venue pour assouvir votre curiosité, au cas où je déplacerais un objet ici, s’enflamma Catherine.

— Vous vous trompez sur mon compte, Madame. Je tenais à vous être agréable, comme je souhaite garder mon emploi. Et en parlant de curiosité, j’estimais nécessaire de vous dire que la nouvelle femme de chambre ne s’est pas encore présentée à l’office.

— Audrey ?

— Qui d’autre, Madame ? Je m’interroge sur son absence non justifiée, ce qui mériterait son renvoi.

— Ce n’est pas à vous d’en juger. Lui avez-vous téléphoné ?

— Sans résultat, je tombe sur un répondeur et je lui ai laissé des messages afin d’exprimer mon mécontentement, car je suis quand même responsable de tout le personnel.

Agacée, Catherine scruta les traits émaciés de Nadine qui avait la posture d’un soldat au garde-à-vous.

— Vous pouvez disposer, lui dit-elle d’un ton sec. Audrey a dû avoir un empêchement ou bien elle est souffrante.

— Qui fera son travail, Madame ? Monsieur Bastien désire des draps propres et ses chemises et son costume gris doivent être envoyés à la blanchisserie.

— Il n’y a rien d’urgent, trancha-t-elle.

Quand la gouvernante s’éloigna après l’avoir saluée d’un signe de tête, Catherine ferma le verrou et alla s’asseoir dans le fauteuil en cuir de Jean-Charles.

— Je ne me ferai jamais à cet endroit, s’avoua-t-elle tout bas.

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