L'Amour Interdit 2 - Hadès by Alexandra Adornetto

Auteur:Alexandra Adornetto [Adornetto, Alexandra]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Jeunesse
Éditeur: POCKET
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

XVIII

Le portail

— Rentre à l’hôtel, Tuck, ai-je proposé. C’était mon idée. Je ne devrais pas t’entraîner là-dedans. Dis à Jake que je t’ai échappé. Asia confirmera ta version.

— Vous n’irez pas là-bas sans moi ! a-t-il déclaré avec force.

— Si tu insistes… Je l’empêcherai de te faire du mal.

— N’y pensons pas maintenant.

Nous avons quitté le dédale de tunnels. Au bout d’un moment, l’atmosphère est devenue étouffante ; le paysage désertique, où flottaient d’épaisses nappes de brouillard, gênait notre progression. Nous restions coincés dans une mystérieuse dimension sans début ni fin. Le plus pénible, c’était le gémissement angoissé des âmes égarées qui nous frôlaient dans la brume. Un sentiment atroce de désolation m’a submergée, comme si on détachait mon âme de mon corps. Mon pouls s’est emballé et j’ai ralenti :

— Je suis fatiguée.

Tucker m’a pris la main afin de maintenir la cadence.

— Cet endroit fait toujours le même effet aux gens. Il faut continuer !

La Zone ne l’affectait pas de la même manière, peut-être parce que son long séjour à Hadès l’avait immunisé… ou que, moi, je ressentais mieux le désarroi des âmes.

— Si on traîne trop, les Traqueurs risquent de nous repérer, a-t-il enchéri.

J’avais oublié que, en tant qu’ange, je diffusais un parfum frais de pluie printanière qui se dissolvait dans l’atmosphère enfumée des clubs mais ne passait pas inaperçu une fois dehors.

— Les Traqueurs ? Qui est-ce ?

— Ils pourchassent les âmes qui ont osé s’aventurer dans la Zone.

— Et ces âmes repartent danser en boîte ?

— Pas exactement.

— On les jette au fond du cratère, hein ? Ne t’inquiète pas, Tuck. J’ai tout vu.

Alors que je voulais le convaincre de ne pas m’épargner la dure réalité de l’Enfer, il a posé la main sur ma bouche.

— Chut !

— Quoi ?

J’ai tendu l’oreille. Au bout d’un instant, j’ai entendu une voix féminine désespérée crier mon nom :

— Bethany ! Bethany, c’est moi.

Un courant d’air chaud a tourbillonné autour de moi.

— Qui êtes-vous ? ai-je balbutié.

— Tu ne te souviens pas ?

— On ne vous voit pas, a annoncé Tucker. Sortez des ténèbres.

Une jeune fille s’est lentement matérialisée sous mon regard effaré. Sa crinière blonde, son nez retroussé, son petit air mutin m’étaient douloureusement familiers. Ses cheveux étaient plus ternes, ses joues s’étaient creusées, mais il n’y avait pas d’erreur possible. Ses prunelles bleues étincelaient dans son visage crasseux. Sa détresse était telle que j’en ai eu le cœur brisé.

— Taylah, c’est toi ? Qu’est-ce que tu fais ici ?

— Je te retourne la question, a-t-elle dit d’un air absent.

Vêtue, comme à l’accoutumée, d’un top moulant et d’une jupe courte, Taylah était pieds nus. Dans la poussière, je distinguais son vernis écaillé.

— Toi aussi, on t’a enlevée ? C’est Jake qui t’a amenée ici ?

— Non, je suis passée en jugement. Après ma mort dans la salle de bains, j’ai entendu des voix qui comparaient le poids de mes péchés à celui de mes bonnes actions… et, patatras ! j’ai dégringolé.

— C’est sûrement une méprise ! me suis-je exclamée.

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