Là où brillent les étoiles by Nadia Hashimi

Auteur:Nadia Hashimi [Hashimi, Nadia]
La langue: fra
Format: epub
Tags: FICTION / Littérature
Éditeur: Hauteville
Publié: 2021-10-13T00:00:00+00:00

Ça fait trois jours, Aryana. S’il te plaît, dis oui. Je te promets que ce ne sera pas la décision la plus difficile de ta journée.

Mes doigts hésitent au-dessus du clavier. Je veux répondre, mais ne sais pas ce que j’ai envie de dire. Voilà le problème. Je range mon portable et commence mon jogging. L’air du soir est inerte, c’est à peine s’il murmure entre les feuilles.

Je sais très bien que cela fait trois jours.

J’atteins la balise du demi-kilomètre. Les panneaux sont de petits carrés rouges cloués au piquet de clôture. La couleur verte aurait été un meilleur choix. C’est tellement basique que même les enfants de maternelle le savent. Vert : on y va. Rouge : on s’arrête.

On y va.

On s’arrête.

Si la vie comportait des panneaux routiers ou des balises, Adam aurait sa réponse à l’heure qu’il est, et je pourrais courir l’esprit tranquille.

Mais la vie ne compte ni panneaux routiers ni balises.

J’atteins le kilomètre et je resserre ma queue de cheval. Je ne délibère jamais dans la salle d’opération, même dans les situations les plus critiques. La frontière est mince entre la prudence et l’hésitation, et j’ai découvert que ces atermoiements ne font que retarder l’action nécessaire. Si j’hésite, cela veut dire que je ne me suis pas assez bien préparée.

La cousine d’Adam nous a envoyé une invitation tardive à son mariage, qui doit avoir lieu dans quinze jours. Cela tombe la semaine où j’avais prévu une escapade dans la maison du lac, pour écouter les criquets et contempler le clair de lune au-dessus de l’eau. Adam pense que nous devrions reporter notre séjour et nous joindre à sa famille pour les festivités, dans un restaurant du Connecticut.

Je ne sais pas comment lui expliquer que je ressens un certain malaise ces derniers temps, quelque chose que je n’ai pas éprouvé depuis longtemps. Cela me donne envie de m’accrocher à ma routine, à ma maison, le temps que passe la vague.

Je parcours mon deuxième kilomètre, puis mon troisième et mon quatrième, tandis que le crépuscule cède la place à la nuit. Les phares percent le rideau d’arbres qui bordent le chemin, projetant des ombres étranges sur le sol. Je cours de nuit, car il devient impossible, dans le noir, de savoir si le sel sur mon visage vient des larmes ou de la sueur. Pour me convaincre que je n’ai pas peur de ce qui pourrait se tapir dans les buissons. Je ne regarde pas par-dessus mon épaule. Je me contente de courir plus vite, plus énergiquement.

Pour me prouver mon courage face à l’obscurité.

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