La Nuit du chasseur by R. A. Salvatore

Auteur:R. A. Salvatore [Salvatore, R. A.]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantasy
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

***

— Ma puce, oh, chère petite, dit Tos’un quand il retrouva enfin Doum’wielle dans les tréfonds de l’Outreterre.

La colonne Baenre avait laissé Tsabrak pour retourner à Menzoberranzan.

— Dans quoi m’as-tu entraînée ? lança Doum’wielle d’une voix où se mêlaient terreur, stupeur et désarroi.

Un désespoir qui blessa Tos’un au-delà de ce qu’il imaginait possible. Il était fils de la Maison Barrison Del’Armgo, après tout : guerrier drow d’essence noble, membre éminent de la Deuxième Maison de Menzoberranzan, qui possédait peut-être la meilleure garnison drow du monde ! À quoi bon s’inquiéter pour sa fille en dehors de la gloire – ou des tracas – qu’elle pouvait lui apporter ?

— À quoi t’attendais-tu ? répondit-il assez durement. Ne t’ai-je pas enseigné la mentalité drow ? Grandir auprès de cousins mollassons a-t-il fait de toi une faible ?

— Père…

— Silence ! s’emporta-t-il en la giflant. Es-tu drow ou darthiir ? insista Tos’un en employant le terme drow désignant les elfes de la surface avec le fiel de rigueur.

— Si je suis une darthiir, je suis morte.

— Si tu es une darthiir, s’empressa de clarifier Tos’un, tu imploreras la mort. Crois-tu que Mère Matrone Quenthel, ou quiconque à Menzoberranzan, va laisser…

— As-tu aimé ma mère ? l’interrompit Doum’wielle.

— « Aimé », cracha le drow avec mépris.

La question le bouscula plus qu’il ne souhaitait l’admettre… fût-ce à lui-même ! Oui, il avait aimé Sinnafain. Oui aussi, son séjour chez les elfes de Boilune, d’abord simple affaire de survie, avait au fil des ans débouché sur autre chose. Mais, désormais, cette autre chose était synonyme de mort certaine, pour lui comme pour sa fille.

— L’amour est réservé à la déesse, rappela-t-il. J’étais le prisonnier de ta mère, rien de plus. J’ai pris tout le plaisir charnel que je pouvais trouver auprès d’elle, et de ce plaisir sont nés ton frère et toi. J’étais condamné à rester auprès d’elle, au sein de sa maudite tribu darthiir. Mais aujourd’hui, tu m’as conduit… à la maison.

Doum’wielle resta un long moment sans bouger, le temps de méditer ces paroles et le parfait cynisme qu’elles contenaient. Son regard s’abaissa jusqu’à la hanche de Tos’un.

— Donne-moi mon épée, ordonna-t-elle.

— La Mère Matrone m’a dit de la porter.

Doum’wielle lui décocha un regard haineux, implacable. Tos’un devina le combat interne qu’elle livrait, aussi flagrant que celui qu’elle avait mené pour dominer Khazid’hea. À présent, elle luttait pour étouffer son côté darthiir, cette mollesse elfique héritée de Sinnafain et de l’environnement du Boilune. Elle devait gagner ce combat, comprit Tos’un, de manière incontestable et rapide, faute de quoi elle serait livrée aux bourreaux de Menzoberranzan et survivrait peut-être… sous forme d’abomination à huit pattes.

— L’épée est mienne, insista-t-elle, j’ai payé le prix du sang pour l’avoir.

— Je te la rendrai dès que la Mère Matrone y consentira.

Voyant Doum’wielle blêmir, il remarqua qu’elle regardait subitement derrière lui. Aussitôt retourné, Tos’un découvrit Quenthel sous son nez.

— Une fois de retour à l’est, s’enquit la matriarche avec un sourire en coin, dois-je autoriser Tos’un Armgo à conduire l’assaut

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