La dernière nuit de Cincinnatus Leconte by Mémoire d'encrier

La dernière nuit de Cincinnatus Leconte by Mémoire d'encrier

Auteur:Mémoire d'encrier
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Mémoire d'encrier
Publié: 2013-10-28T00:00:00+00:00


Notes de Louis Brutus

Début 1912

Cincinnatus Leconte s’efforce de sortir notre pays de sa nuit séculaire. Son pouvoir ne sera qu’une effervescence de plus s’il ne s’accompagne d’une aube radieuse. Nos séditions antérieures n’étaient pas motivées par la quête de mieux-être collectif. L’on aspirait au pouvoir comme au premier rôle d’une farce écrite par des financiers étrangers et des politiciens roublards. Fusillades et incendies imprimaient à la pièce un caractère d’épouvante. Dans leur perpétuel désarroi, les naïfs confondaient changement et réforme. Oui, Leconte jure de briser l’habitude, de nous épargner la faillite, de mettre fin au paradoxe de ce petit pays sans industries, livré au chômage, à la misère, laissant aux mains de l’étranger ses ressources naturelles. Le commerce de détail, repris des mains des Syriens et restitué aux Haïtiens, est le corollaire du régime de probité qu’il entend imposer. Il aiguille vers les profits honnêtes du travail des appétits qui s’alimentaient de rapines. Rapines douanières, rapines dans les achats de fournitures… Navrant! Nos codes sont si peu conformes à notre tempérament, à nos capacités… Il entame leur refonte. Nos finances banqueroutières? Il s’acharne à les assainir. Nos cadres inexistants? Il commence à les former. Notre administration à la débandade? Il s’obstine à y mettre de l’ordre. Il veut nous sortir de notre agriculture de hordes primitives. Il faudrait un dieu à sa place. Et le temps le nargue.

Le tableau brossé par son beau-fils John Laroche, le ministre des Travaux publics, est préoccupant. Sa voix puissante gronde dans mon cerveau comme elle remplissait la salle du parlement :

– Les rues, non entretenues, sont transformées en fondrières par les pluies. Les routes départementales, défoncées, compliquent le transport des vivres et des denrées. Les ponts sur nos rivières menacent de s’effondrer, rompant toutes communications entre les villes et les bourgs.

Leconte travaille à les relever et il compte faire œuvre durable.

– Partout, les prisons sont lézardées, offrant des issues aux évasions.

Il doit dénicher des ressources pour pallier cette situation urgente qui menace la sécurité des familles et de la propriété privée. Cette sale habitude de ne pas payer de taxes, ou si peu, doit cesser.

– Les marchés en fer sont oxydés par manque d’entretien. Le service télégraphique se détériore ; le fil actuel a plus de quinze ans d’usage. Le service hydraulique est rudimentaire, les voies de canalisation défectueuses.

Où prendre l’argent nécessaire à ces réfections? Il faudra rogner sur les appointements des hauts fonctionnaires, augmenter les impôts des riches.

– Les édifices publics ont l’air misérable. Les postes militaires ressemblent à des cahutes abandonnées.

La restauration des baraquements militaires débute. Quant aux douanes, elles sont mal aménagées. Ah! lieux de corruption endémique : chaque chef d’État a toujours nommé aux douanes des fidèles pour qu’ils s’y enrichissent et partagent leur profit avec lui. Pour avoir été ministre et trempé dans des combinaisons louches, Leconte sait le fond du problème. Quel spectacle cru et laid! John Laroche en a rendu un portrait exact. Que d’écuries à nettoyer! Cincinnatus est aussi un vidangeur. Il lui faut ancrer dans



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