Histoire d'urgences by Pelloux Patrick

Histoire d'urgences by Pelloux Patrick

Auteur:Pelloux Patrick [Patrick, Pelloux]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: le cherche midi
Publié: 2012-01-31T23:00:00+00:00


L’ÉGALITÉ EN COMA DÉPASSÉ

23 novembre 2005

Pardon d’être un peu catégoriel mais, au-delà du simple drame que représente la réforme du statut du médecin praticien hospitalier vers un statut précaire qui se base sur la productivité de soins, il faut bien comprendre que les conséquences seront dramatiques pour les hôpitaux et les malades.

Pendant que le gouvernement déclenche des émeutes et occupe le bon peuple avec du pain, des jeux et de la haine, les démantèlements continuent, à commencer par celui de l’hôpital. La mesure annoncée paraît innocente. Elle concerne le statut de médecin praticien hospitalier. Pour acquérir ce statut, il faut passer un concours, comme c’est le cas dans toute la fonction publique. Et, comme pour tout concours ou examen, l’égalité est de mise, aucune ségrégation n’est tolérée, le savoir doit être le seul critère. En principe.

Mais le monde médical se fout des principes. Au lieu de réformer en profondeur les études de médecine et le lien entre l’hôpital et l’Université, on vient de supprimer les épreuves écrites de ce concours. L’écrit, c’est l’anonymat, donc l’égalité. Dans un concours, les épreuves écrites sont les seules où, en théorie, ne peut s’exercer aucune ségrégation. Les supprimer, c’est supprimer la garantie de l’impartialité du jury, composé de médecins et de professeurs.

À l’oral du concours, l’an passé, une candidate d’origine ivoirienne née en France, ayant toujours vécu sur notre territoire, donc française, ne s’est vu poser que des questions sur ses origines. Recalée.

Sans parler du sexisme, car, pour certains, la féminisation serait un problème en médecine. C’est que les femmes « vont faire des enfants », « ne veulent pas travailler comme des hommes »… De solides arguments au lait cru, qui laissent à penser que le monde médical aimerait retourner au bon vieux temps du Voyage au bout de la nuit de Céline. Ainsi, des femmes médecins qui avaient réussi les épreuves écrites se sont vues harcelées à l’oral : « S’il n’y a pas de poste prévu pour vous, ça sert à rien de rester à l’hôpital »… La collègue est repartie les larmes aux yeux. Une autre a raté son concours, car, « À trente-cinq ans, demander un poste de praticien hospitalier, mais vous êtes inconsciente, madame » ! Seul l’anonymat de l’écrit permet d’éviter cette ségrégation rampante où les jeunes le sont trop et les vieux inutiles.

On a vu aussi se développer le régionalisme. Même cas de figure, l’écrit est parfait, et à l’oral : « Mais vous êtes de la faculté de Lille, s’étouffe un prestigieux professeur, y en a marre de voir toujours des postes dans le Nord et rien dans ma région ! » Le candidat a été recalé et a renoncé à travailler dans le service public. Ces mêmes professeurs déploreront ensuite la désaffection des médecins pour l’hôpital…

La copie écrite anonyme garantit aussi l’ouverture d’un statut aux médecins handicapés. Un de nos collègues de Bordeaux a réussi le concours. Brillant à l’écrit, inutile de vous dire qu’à l’oral les chuchotements des – pourtant – médecins du jury en disaient long.



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