Femmes, soyez soumises à vos maris by Alice Davril

Femmes, soyez soumises à vos maris by Alice Davril

Auteur:Alice Davril
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Larousse
Publié: 2023-12-01T13:18:42+00:00


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Ma peur des vagues remonte à l’enfance. À Plouneour-Trez déjà, à la plage avec mes parents, un tout petit peu d’écume sur le sable suffisait à faire naître l’appréhension. J’avançais alors avec une prudence extrême, mais à deux ou trois reprises un rouleau aussi inattendu que puissant m’avait surprise, et j’avais émergé de l’eau en pleurs, me jurant de ne plus jamais faire confiance à cette mer imprévisible, ses algues noires qui s’emmêlent dans les couettes, ce sable qui crisse entre les molaires.

Depuis qu’Henry a acheté son voilier, on passe chaque été un mois entier à bord. J’ai espéré qu’à force de naviguer, j’apprivoiserais mes angoisses. J’ai moins peur des vagues, mais le mal de mer a pris le relais, terrible, puissant. Les nausées me prennent dès que je pénètre à l’intérieur du bateau. J’ai à peine le temps de changer une couche ou de chauffer un biberon que je suis obligée de sortir sur le pont, le teint jaune cire, titubant, et de m’écrouler sur le ventre pour vomir dans l’eau. Sitôt mon estomac vide, je me relève et retourne m’occuper des enfants ou d’une manœuvre à opérer pour le voilier. Dès que la force du temps évolue, il faut aller chercher une autre voile sous le cockpit et sortir un à un les lourds sacs de nylon, avant de retourner à l’avant du navire en traînant la voile adéquate. J’apprends à mener cette mission, enceinte, à naviguer en protégeant mon ventre, et même à barrer en donnant le sein, comme cet été 2004, où j’allaite Clotilde, âgée de quatre mois et demi.

En escale à Paimpol, on doit rallier Le Havre et on prévoit de partir à l’aube. Mais juste avant le départ, je me rends à la capitainerie où je découvre les prévisions : un vent force 6 à 7, fraîchissant 8 avec rafales. Blême, je reviens à bord prévenir Henry, afin qu’on décale notre départ à demain. Mais Henry ne veut rien entendre. Il veut partir maintenant, et s’agace de mes inquiétudes ridicules de « bonne femme », de ma confiance aveugle dans les prédictions de Météo France. Le cœur lourd et l’estomac noué, alors que Clotilde et Étienne dorment encore dans la cabine, je prends mon poste à la barre et prépare le foc à l’avant pendant qu’Henry hisse la grand-voile. Le vent siffle déjà dans les haubans, aigu, agressif. Je mets le cap sur Guernesey, vent dans le dos, tout en donnant le sein à Clotilde qui vient de se réveiller. Henry la recouche dans son petit couffin, placé sur la couchette avant. Je prie pour qu’elle se rendorme vite, car les conditions se dégradent : la houle venue de l’Atlantique amplifie les vagues, et la pluie s’abat avec violence sur notre embarcation. J’enfile, par-dessus ma tenue étanche intégrale, mon harnais de sécurité arrimé à la ligne de vie.

Le vent forcit encore et nous fouette maintenant de rafales force 8. Je vois le plaisir dans les yeux d’Henry. Avec une étincelle d’excitation, alors qu’il progresse



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