Cours petite fille ! by COLLECTIF

Auteur:COLLECTIF
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Des Femmes
Publié: 2020-03-31T07:09:33+00:00

Quels rapports entre « désir », « séduction », « galanterie » et « libertinage » ?

L’ordre des termes, dans la série que vous constituez ainsi, a des implicites sensibles il me semble…

Il va de soi que le désir vient en facteur commun qui détermine les trois autres. Du coup, cette partie de votre question se situe au plan anthropologique. Mais il faut préciser : désir de quoi ? La série telle que vous la proposez implique une focalisation sur le désir sexuel. Il y en a d’autres ; le désir de pouvoir, le désir de richesse, le désir de savoir… Mais il est vrai que la libido a connu à peu près le même sort que la galanterie. À l’origine, il y a plusieurs libidos (sciendi, dominandi…) et on en est venu à ne penser qu’à une. Alors, pour m’en tenir au cas galant, je dirai que le premier désir du galant homme est un désir de sociabilité. Son art de plaire est l’expression d’un désir d’être agréé : c’est le sens même de l’expression « être agréable ». Ce qui peut se traduire entre autres par le souhait d’être agréé par les dames, et inclure du désir pour une femme, mais qui ne se réduit pas à cela. Chez le galant homme, le désir de plaire implique un substrat de bienveillance envers autrui : le galant homme veut du bien aux autres, il est altruiste et prévenant. Mais il y a aussi, dans la contradiction que j’ai dite, ceux qui veulent se faire du bien, « se faire plaisir » ; soit par la frime vaniteuse, soit dans le plaisir sexuel ; un désir, disons, concupiscent. Votre série de termes, en plaçant « séduction » avant « galanterie » et « libertinage » me semble impliquer ce désir de se faire plaisir en prenant du plaisir au détriment d’autrui. La séduction, il faut le rappeler, désigne en son sens premier une perversion de l’art de plaire : plaire suppose de faire plaisir à l’autre, mais séduire c’est au contraire détourner (revoyez l’étymologie) l’autre, le ou la berner ; dans le cas des relations sexuelles, c’est exhiber une parade amoureuse riche de promesses pour que l’autre se donne et serve ainsi au plaisir du séducteur. Si une galanterie intervient là, c’est une galanterie des apparences, c’est un jeu avec les belles manières pour faire croire que l’on est sincère…

Il en va de même en ce qui concerne le libertinage. Ce terme a pu désigner la libre-pensée, et il a désigné aussi des mœurs dissolues. Dans un emploi courant aujourd’hui, il équivaut à peu près à échangisme et partouzage, du Sade banalisé. De ce fait, la tentation est grande, certes, d’aller du désir à la séduction et au libertinage comme forme de la liberté sexuelle, et d’inclure dans ce parcours la galanterie entendue comme le nom des amours illégitimes.

Mais à propos de parcours, il faut rappeler qu’historiquement il y a eu une utopie du voyage en relation amoureuse. La galanterie loyale originelle prenait en compte les questions du désir et de l’art de plaire.

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