Chroniques de la cour des faës Tome 1 - Âmes miroirs by Olivia Atwater

Auteur:Olivia Atwater [Atwater, Olivia]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2023-11-01T23:00:00+00:00

Chapitre onze

Elles montèrent dans la suite de Lady Carroway, où cette dernière fit cadeau à Dora de l’une de ses anciennes robes, une ravissante soie vert menthe, tellement au-dessus de ses moyens qu’elle se sentit un peu ridicule dedans, d’autant que le corsage n’était visiblement pas à ses mesures. L’une des femmes de chambre l’aida à se changer, réussissant même à ajuster la robe en épinglant le tissu, assez bien pour lui donner une allure à peu près convenable, puis parvint à dénicher les ballerines assorties, qui s’avérèrent plus ou moins à sa taille.

– Je m’efforcerai de vous la rendre dès que possible, promit Dora. Elle m’a l’air si précieuse… j’hésite presque à la porter.

Lady Carroway eut un petit mouvement d’épaules.

– Voilà des années que je ne la mets plus, répliqua-t-elle. Je l’aime beaucoup, mais elle sied mieux à une demoiselle. Il était grand temps qu’elle quitte mes placards.

Elle sourit.

– Je ne me souviens pas d’avoir déjà vu une dame faire preuve d’autant de grâce et de calme face à une situation aussi tendue. Vous m’avez réellement impressionnée, Miss Ettings.

Dora la regarda avec étonnement. Quelque part, au fond d’elle-même, ces bonnes paroles vinrent bousculer l’amoncellement de misères, délogeant quelques-unes des méchancetés qui s’y étaient enracinées.

– C’est vraiment très aimable à vous, répondit-elle. Cependant, je crains bien qu’il ne s’agisse pas vraiment de grâce, mais plutôt d’un défaut de ma personnalité. On me reproche souvent de ne pas éprouver assez d’émotions, my Lady.

– Vous avez pourtant su calmer un magicien furieux et le toucher aux larmes, répliqua Lady Carroway avec une pointe d’ironie. En l’entendant s’excuser, j’ai failli m’évanouir sous le choc ! Et, pour ce soir au moins, il semble réellement apaisé, et même disposé à faire preuve d’une contrition et d’une générosité stupéfiantes. Continuez à accomplir ce genre de miracles et vous pourriez être canonisée.

Dora baissa les yeux sur ses pantoufles vertes.

– Je le suggérerai au pasteur lorsque je le verrai ce dimanche, dit-elle d’une voix absente. Mais je crains de mourir bien avant d’être béatifiée, Lady Carroway. Puis, je dois admettre que cette idée ne m’attire guère. Je m’efforcerai d’éviter de faire des miracles, à l’avenir.

La vicomtesse se mit à rire, avec beaucoup plus de chaleur à présent qu’elles se trouvaient derrière des portes closes, loin de la table du dîner.

– Ah, Miss Ettings, je sais que vous n’épouserez pas Albert et vous m’en voyez fort navrée, soupira-t-elle. J’aurais adoré vous avoir pour fille.

Dora se figea. Une chaude et confuse palpitation se répandit dans sa poitrine.

– Je… je ne saisis pas ce que vous voulez dire, balbutia-t-elle.

Lady Carroway lui tapota l’épaule.

– Mon fils m’a fait comprendre qu’il s’opposait fermement à cette union. Au début, je vous jure que je n’y ai rien compris, mais à présent, je crois saisir ce qu’il a dû percevoir dès votre première rencontre. Pour arracher l’un de ses rares sourires à Elias Wilder, vous devez posséder un pouvoir de sorcellerie unique. Et je pense que vous êtes au moins aussi éprise de lui que l’est mon fils.

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