Bizarro by Guillaume Voisine

Bizarro by Guillaume Voisine

Auteur:Guillaume Voisine
La langue: fra
Format: epub
Tags: Horreur, Bizarro
ISBN: 978-2-9812869-9-4
Éditeur: La Maison des viscères
Publié: 2015-04-01T00:00:00+00:00


… et il était à nouveau en forme d’homme, debout, dans une chambre.

Une chambre.

Lac isolé encadré au-dessus du bureau. Couvre-lit pêche défraîchie, défait. Causeuse bleu mort-vivant, sage, immobile, sur laquelle se trouvait une valise ouverte.

Une valise qu’il reconnaissait. Qui contenait quelques-uns des sous-vêtements bon marché que sa femme achetait pour lui. Et dans le tiroir de la table de chevet, la boîte de condoms que Vanessa et lui avaient vidée. Et sur le comptoir de la salle de bain — qui lui paraissait un peu haut —, il retrouva son rasoir et sa brosse à dents…

Et dans le miroir, un homme vêtu d’un manteau de fourrure synthétique pourpre, fer à repasser au poing, l’autre main pansée, le pantalon taché, et qui portait en guise de plastron un banc capitonné à demi couvert d’une substance gluante.

Il entendit une porte s’ouvrir. Il sortit en hâte de la salle de bain et vit Vanessa qui arrivait, radieuse, par la porte communicante.

— On est revenus ! On est vivants ! Ah ciboire ! Veux-tu bien m’enlever ça, cette horreur-là !

Elle l’aida à se défaire de Glouton et à l’enfermer dans la salle de bain, puis lui sauta au cou. Il la sentait presque vibrer entre ses bras. Elle serra fort et demanda :

— Penses-tu que les autres se sont rendus aussi ?

— Aucune idée. C’était pas tout à fait comme les portes. J’étais pas encore si proche et j’ai été aspiré quand même. Peut-être que les autres aussi, mais pour le Redresseur, de toute façon…

— De toute façon quoi ?

De toute façon, il avait vu de longs doigts crever les yeux du lutteur et s’y enfoncer tout entiers, emplir sa gorge aussi, et même le Redresseur, le plus fort d’entre eux, ne pouvait pas y survivre. Mais elle n’avait peut-être pas vu.

— Non, dit-il, c’est vrai, il était mal pris, mais ça se peut qu’il ait été aspiré ailleurs lui aussi.

Ils sortirent dans le couloir et entendirent aussitôt crier à l’aide, tout près. Vanessa essaya une porte après l’autre ; l’une d’elles s’ouvrit soudain d’elle-même et une femme affolée en sortit.

— Laissez-la pas s’approcher, disait-elle, elle vient de me sauter dessus, je sais pas d’où elle arrive…

Dans l’encadrement de la porte se tenait une femme élancée, si grande qu’elle devait pencher la tête pour passer. Elle avait les muscles fermes, les cheveux blonds sales et les yeux très verts, les vêtements tachés et ternis, un sac au dos, un coutelas rudimentaire à la ceinture et… quelque chose d’étrange dans ses proportions et son visage. L’allure d’une jeune adolescente, le regard d’une amazone, la taille d’une quasi-géante. Elle posa la main sur son coutelas en apercevant Vanessa qui s’interposait, puis un soupçon de sourire apparut sur ses lèvres. Elle se tourna vers la femme qui l’avait fuie et dit, d’une voix hésitante :

— Maman ?

Carlo regarda l’interpellée, muette, et la reconnut. Le matin où tout avait commencé, il l’avait vue sortir de l’ascenseur avec son conjoint et leurs deux enfants. Il avait le dos tourné quand la plus jeune avait été aspirée par la porte d’entrée.



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