American Rigolos by Bryson Bill

Auteur:Bryson, Bill [Bryson, Bill]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Payot
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Prime d’incompétence

Un article paru l’autre jour dans notre journal local a attiré mon attention. On nous apprenait que la tour de contrôle de notre aéroport, avec toutes les installations afférentes, venait d’être privatisée. Cet aéroport perd de l’argent ; aussi, pour réduire les coûts, la Fédéral Aviation Administration (FAA) a décidé de sous-traiter le contrôle aérien à des gens capables de l’assurer au plus bas prix. J’ai été particulièrement intrigué par la phrase suivante, perdue au milieu de l’article : « Arlene Sarlac, porte-parole du bureau régional de la FAA à New York, n’a pu fournir le nom de la société qui doit gérer la tour de contrôle. »

Eh bien, voilà qui ne me rassure pas ! Vous direz que je suis peut-être un peu parano, mais comme il m’arrive de fréquenter cet aéroport je tiens tout particulièrement à ce qu’il garantisse aux avions un atterrissage plus ou moins normal. En conséquence, j’aimerais bien être certain qu’on n’a pas cédé ce service crucial à, disons, Crash Services (Panama) et que mon prochain atterrissage ne sera pas guidé par un type agitant un balai au sommet d’une échelle. J’ose espérer que la FAA a bien noté, quelque part dans ses dossiers, le nom de l’acheteur. Vous allez dire que je suis exigeant mais ce genre de renseignement me paraît essentiel.

Il faut dire que la FAA n’est pas la plus performante des entreprises. Un rapport gouvernemental du mois d’août dernier a révélé que cette administration souffrait constamment, depuis des années, de graves dysfonctionnements : coupures de courant, équipements vétustes et désuets, personnel insuffisant et surmené, programmes de formation mal adaptés, mauvaise gestion liée à une hiérarchie trop fragmentée. En ce qui concerne les normes d’équipement, le rapport révélait : « 21 bureaux différents ont publié 71 règlements, 7 normes et 29 spécifications ». Conclusion : la FAA n’a aucune idée de l’équipement qu’elle possède, ne sait pas qui est chargé de la maintenance ni même à qui c’est le tour de faire le café. Selon le Los Angeles Times : « Au moins trois accidents auraient pu être évités sans le retard accusé par la FAA dans la modernisation des équipements de contrôle aérien. »

J’évoque cette affaire parce que le sujet de ma chronique est l’incompétence à grande échelle. Malgré tous mes efforts, il subsiste encore un mythe auquel j’aimerais bien qu’on fasse un sort une fois pour toutes, ici même : le mythe de l’efficacité américaine. L’Amérique est tout sauf efficace. La faute en revient surtout à ses dimensions : les grands pays produisent de grandes bureaucraties. Qui dit bureaucratie dit administration, et chaque administration engendre des bureaux qui produisent des tas de règles et de règlements.

Dans ce système, non seulement la main gauche ignore ce que fait la main droite mais elle ignore aussi qu’il existe une main droite. C’est ce que j’appelle le syndrome de la pizza surgelée. Aux États-Unis, si la pizza surgelée est au fromage elle tombe sous la réglementation de la Food and Drug Administration. En

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