Aime comme magique by Pascal Garnier

Aime comme magique by Pascal Garnier

Auteur:Pascal Garnier [Garnier, Pascal]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


— Ben mon gars, t’es dur à la tâche toi, c’est bien, c’est bien.

De sous son tablier elle tire quelques pièces de monnaie qu’elle met dans la main de Félix.

— Tu les as bien gagnées, je t’en mets une de plus.

— Merci madame.

— Vous êtes en vacances ici ?

— Euh... oui.

— Et vos parents, où ils sont ?

— Nos parents ?... ils sont... à la pêche !

— Ah bon. On y va m’sieur Vitali ?

Le vieil homme se soulève péniblement. On dirait que sa peau est trop grande pour lui, il flotte dedans. En passant près du sac de Félix, il tâte la couverture qui en dépasse et balbutie quelques mots. On ne peut pas dire qu’il parle, il fait des bruits avec sa bouche, un peu comme des bulles éclatant mollement à la surface d’une sauce Béchamel. Ça n’est pas sans ressembler aux incantations de Lolette. Son épouse traduit :

— Il dit que son cheval avait la même couverture et qu’il ne l’a pas retrouvée ce matin.

Félix baisse la tête et se gratte le genou. Le petit vieux grommelle de nouveau.

— Il dit que ça l’arrange, son cheval n’en voulait plus, il n’aimait pas la couleur. Bon alors, on y va, monsieur Vitali ? Au revoir les enfants. Nous on est à deux kilomètres d’ici, la ferme Vitali, si jamais vous passez par là... avec vos parents bien sûr, n’hésitez pas !

La camionnette crachotte, se trémousse, puis, péniblement, tourne à droite sur la nationale.

— Tas vu Lolette, trente francs ! Viens on va aller s’acheter à manger. Dépêchons, la boulangerie va fermer.

Ils n’ont pas fait trois pas qu’une camionnette de gendarmerie pareille à une grosse mouche bleue vient se garer devant la boulangerie. Deux gendarmes en sortent (un gros et un petit, évidemment) suivis du directeur de la colonie qui semble avoir définitivement abandonné sa perruque. Ils pénètrent tous trois dans la boulangerie. Cachés derrière des poubelles, Lolette et Félix voient la boulangère tendre un doigt accusateur en direction du marché. Les gendarmes opinent du képi et le directeur se frotte les mains. Derrière la vitrine la scène ressemble à un film muet, mais pas très rigolo.

— La boulangère nous a caftés, faut filer d’ici en vitesse.

Adieu croissants, chocolat, pains aux raisins, la liberté est à ce prix. Tandis que leurs trois poursuivants prennent le chemin du marché, les deux enfants sortent du village et plongent dans un champ de blé mûr qui les dissimule aux regards indiscrets.

Essoufflés, le cœur battant, ils se remettent de leurs émotions. Au-dessus d’eux, une abeille butine un coquelicot qui plie sous son poids. La campagne ronronne sous le soleil de midi. Quelque part au loin des cloches sonnent.

— J’ai une de ces faims !

— Moi aussi.

— Qu’est-ce qu’on va faire ?

— Qui dort dîne ! Après on verra. Tas peur ?

— Un petit peu, pas beaucoup. C’est si joli ici.

Peu de temps après, leurs ronflements font fuir l’abeille.

Un brin d’herbe vient chatouiller le nez de Félix. Le soleil est toujours là avec ses grosses joues rouges, mais il commence à bâiller.



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