Adieu Goulsary by Tchinguiz Aïtmatov

Adieu Goulsary by Tchinguiz Aïtmatov

Auteur:Tchinguiz Aïtmatov [Aïtmatov, Tchinguiz]
La langue: fra
Format: epub
Tags: littérature kirghize
ISBN: 9782268001616
Google: zGTLDAAAQBAJ
Éditeur: Artège
Publié: 2016-07-18T22:00:00+00:00


XII.

Cet automne-là, la destinée de Tanabaï Bakassov changea inopinément.

En redescendant du col, il s’était arrêté dans les pâturages d’automne des collines, décidé à gagner au plus vite le campement d’hiver dans la montagne.

Juste à ce moment, le messager du kolkhoze arriva.

« C’est Tchoro qui m’envoie, lui dit-il. Il te demande d’aller le rejoindre à l’aïl dès demain, de là vous irez au District, où il y a conseil. »

Le lendemain, Tanabaï était au bureau du kolkhoze. Tchoro s’y trouvait déjà avec le secrétaire du Parti. Il avait bien meilleure mine qu’au printemps, quoiqu’il fût visible, à ses lèvres bleues et à sa maigreur, qu’il portait toujours la maladie en lui. Il faisait bonne contenance, semblait très occupé, une foule de gens l’entouraient. Tanabaï en fut tout réjoui pour son ami. Bon, il avait repris goût à la vie, il se remettait au travail.

Lorsqu’ils furent restés seul à seul, Tchoro leva les yeux sur Tanabaï, porta la main à ses joues durcies, amaigries, et sourit :

– Tandis que toi, Tanabaï, tu ne vieillis pas. Toujours le même ! Depuis quand ne nous sommes-nous pas vus ? De ce printemps ? Le koumyss et l’air des montagnes, c’est une grande chose… Mais moi, je cède peu à peu du terrain, tu vois. C’est sans doute que mon heure est venue…

Puis après un silence, il se mit à parler affaire :

– Voilà de quoi il retourne, Tanabaï. Je sais bien que tu me diras qu’il y a des gens à qui il suffit de tendre le bout du doigt pour que tout le bras y passe. Cette fois aussi, ça sera comme tu voudras. Demain, nous allons au Conseil de l’Élevage. Et ça va très mal, dans l’élevage, surtout dans l’élevage ovin, et surtout, dans notre kolkhoze. On peut dire que c’est fichu. Le Comité de district nous a adressé un appel : que les communistes et les komsomols se dévouent et aillent où ça va le plus mal, les troupeaux de moutons. Alors, aide-nous à nous tirer d’affaire. Tu l’as déjà fait pour les chevaux, et je t’en remercie. Fais-le encore une fois, va à la rescousse du mouton.

– Tu vas vite en besogne, Tchoro.

Tanabaï se taisait. « Je me suis habitué aux chevaux, se disait-il. Avec les brebis, je vais joliment m’ennuyer. Et puis, comment ça va marcher, tout ça ? »

– Je sais que je te force, Tanabaï, reprit Tchoro. Je n’y peux rien : c’est une mission du Parti. Il ne faut pas m’en vouloir. Si un jour tu fais appel à mon amitié, je te revaudrai tout cela.

– Tu me le revaudras même si bien que je n’aurai plus qu’à verser toutes les larmes de mon corps ! dit Tanabaï avec un grand rire.

Il ne soupçonnait pas que le temps n’était pas si éloigné où il devrait lui rappeler cette promesse…

– Les moutons, il faut que j’y réfléchisse, que j’en parle à ma femme…

– D’accord, réfléchis, seulement, il faut que tu aies pris la décision d’ici demain matin, parce que je dois faire mon rapport au Conseil.



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