[Agence 13-1] Dortoir interdit by Serge Brussolo

Auteur:Serge Brussolo
La langue: fra
Format: mobi
Tags: Thriller
ISBN: 9782265088740
Éditeur: Alexandriz
Publié: 2009-11-17T20:31:43+00:00

Bien évidemment, ce que je redoutais s’est produit. On m’a rappelée dans la salle des interrogatoires, mais cette fois, mon interlocuteur était un inspecteur de L.A. Quarante ans, chauve, une gueule de boxeur, des mains énormes aux ongles jaunis. Il s’est présenté : détective Lomax, Homicide Squad.

— Eh bien, Miss Katz, a-t-il ricané, on a un drôle de pedigree, ce me semble…

Il parcourait mon dossier, l’œil allumé, comme s’il était en train de lorgner la double page centrale de Playboy.

Le petit jeu du chat et de la souris a duré une trentaine de minutes. Il cherchait à me mettre mal à l’aise. J’ai demandé si j’étais accusée du massacre et si je devais d’ores et déjà exiger la présence d’un avocat.

— Pour le moment, vous n’êtes pas sous le coup d’une inculpation, a-t-il grommelé. D’après les premières constatations, Tobbey et sa famille ont été abattus hier soir, aux alentours de 23 heures. Vous affirmez avoir rejoint votre copine dans un bar à 22 heures et être restée en sa compagnie jusqu’à minuit, environ. À ce moment-là, vous en êtes repartie ivre morte avec un homme dont vous ignorez l’identité, et que vous avez néanmoins ramené à votre domicile. Jolie mentalité ! On vérifiera. Le barman aura peut-être meilleure mémoire que vous. Apparemment, vous avez un alibi. Je dis bien apparemment. Ce serait tout de même mieux qu’on retrouve le type qui vous a sautée, et qu’il déclare sous serment avoir passé la nuit entre vos cuisses. Maintenant, vous allez me dire ce que vous fricotiez avec Tobbey. Il vous aurait engagée pour décorer un bunker… Vous déconnez, là ?

Ça a duré comme ça une heure et demie. Il mettait systématiquement en doute chacune de mes réponses. Il éclatait de rire à la façon des mauvais acteurs des sixties. Ses dents étaient trop blanches et trop parfaites. Une prothèse sans doute. On aurait dit qu’il tenait à les exhiber. Il multipliait les grossièretés pour me déstabiliser. Il s’adressait à moi comme à une criminelle récidiviste. J’ai tenu bon. Mon père m’avait préparée à ça dès l’âge de dix ans. Je connaissais tous les trucs. Le mépris, la violence, les insultes, les câlineries… On y avait joué avec Daddy. Il appelait ça des « répétitions ». Ça m’avait souvent amenée au bord des larmes, mais j’avais fini par m’endurcir. De ce point de vue-là, j’étais tout sauf une novice.

Il a fini par jeter l’éponge. Un autre l’a remplacé, plus âgé, plus élégant. Distinguished grey. Une espèce d’ersatz de George Clooney. Il s’est présenté : Dave Dogson.

— D’après vous, a-t-il attaqué, qui pouvait en vouloir assez à Tobbey Zufrau-Clarkson pour l’abattre, lui et sa famille, d’une rafale de fusil-mitrailleur ?

J’ai sursauté. Dans mon esprit, le massacre avait été perpétré à l’arme blanche. Au sabre, plus précisément. J’ai réalisé que je m’étais laissé influencer par cette stupide histoire de colonel fantôme.

J’ai bêtement répété :

— Fusil-mitrailleur ?

— Oui, a confirmé Dave Dogson. Vous n’avez pas vu les impacts ? Les murs en sont criblés. Celui qui a fait ça était animé d’une rage démentielle.

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